L’Instance Régionale de Débat Public : questions à Myriam Cau
L’Instance Régionale de Débat Public (IRDP) est un dispositif régional créé en mars 2012. C’est Myriam Cau, vice-présidente « développement durable, démocratie participative et évaluation » qui est à l’origine de cette organisation unique en France au niveau régional.
Cette instance de concertation ne prend pas de décision : les débats sont des temps de partage et d’échanges d’informations, de souhaits, de réflexions qui qualifient et éclairent les participants. Après une restitution finale des débats, l’objectif final est d’aider les politiques à faire les bons choix.
Comment s’organisent les débats ?
« La première possibilité ce sont des débats régionaux demandés par la Région et qui concernent les politiques ou des enjeux régionaux : des projets d’aménagements ou des travaux (à condition que la somme nécessaire au projet soit en dessous du montant qui nécessite de faire appel à la Commission Nationale de Débat Public – CNDP).
La nouveauté c’est la possibilité d’organiser également des débats plus sociétaux alors que la Commission Nationale du Débat Public ne s’intéresse qu’à des projets d’aménagement ou d’équipements.
La deuxième alternative est pour les acteurs extérieurs de saisir la Région : collectivités locales, acteurs institutionnels voire associatifs. Ceux-ci peuvent demander l’organisation sur des débats d’enjeu infra régional et sur des sujets qui ne sont pas du ressort de la Région. Dans ce cas l’Instance Régionale de Débat Public apporte une assistance technique et opérationnelle, pour permettre que ce débat ait lieu avec toute la rigueur que l’on attend de la notion de débat public au sens de la CNDP ».
Des débats… sur quels thèmes ?
« Les thématiques sont extrêmement diverses.
Nous avons déjà traité des usages du numérique dans l’agglomération de Saint-Omer. Actuellement un grand débat régional sur l’alimentation est en cours depuis mars. C’est un sujet qui touche à la fois le social, l’environnemental et qui est par essence un débat de société avec des implications économiques très fortes.
Nous envisageons de mener ensuite un débat qui sera davantage de stratégie territoriale à propos de la création de nouvelles intercommunalités, suite à la dernière refonte de la carte des intercommunalités ».
Que représente la réussite de la mise en place de l’Instance Régionale de Débat Public ?
« Cela représente une exigence forte que la Région soit capable de porter des débats publics de grande ampleur avec une extrême rigueur dans l’association de tous les acteurs. Chacun peut s’exprimer soit par des moyens numériques, par des moyens écrits soit en participant à des échanges de toutes formes : des séances plénières d’information, des séances de travail plus participatives…
L’organisation doit afficher de la rigueur, du recul, la garantie de neutralité et la garantie d’accès à toute l’information et à toute l’expertise.
C’est une démarche de qualité unique en son genre, portée par une région. Et un élément de plus dans une politique régionale de démocratie participative.
Cela permet de poser dans l’espace public des sujets qui sont des enjeux politiques ; chacun peut donc à la fois s’acculturer, se qualifier et apporter un éclairage qui va permettre aux élus ou décideurs de prendre les meilleures décisions possibles ».
Quels retours sur cette expérience ?
«Nous aurons davantage d’éléments bientôt avec les conclusions finales du débat public de Saint-Omer. Mais déjà sur la démarche de débat en elle-même, on sait qu’elle est extrêmement bien perçue. Beaucoup de citoyens de territoires ruraux ou de l’agglomération de Saint-Omer ont été extrêmement contents d’être consultés, satisfaits qu’on leur fournisse des informations et qu’ils puissent prendre le temps de formuler un avis en étant éclairés. Souvent dans les territoires non métropolitains les habitants se sentent éloignés des réflexions et des prises de décisions. Le débat public rapproche les citoyens des institutions.
Si on prend l’exemple du débat sur le numérique à Saint-Omer je constate que les participants proposent des choses de bon sens et pragmatiques ».
Le débat public régional fera-t-il des petits ?
« Si notre démarche est probante j’espère qu’elle donnera l’envie à d’autres régions de se lancer.
La CNDP elle-même réfléchit à l’évolution de son fonctionnement. Elle utilise très souvent la formule des séances plénières d’information et quelle que soit la qualité des débats, je pense que cette forme d’exercice arrive un peu à épuisement et qu’il faut diversifier les formes et les modes pour aller chercher la parole de tous les citoyens. Peut-être que l’on amènera une forme de biodiversité dans la façon de construire des débats publics ; cela peut à la fois donner des idées à la Commission Nationale et si notre expérience fonctionne en région Nord – Pas de Calais, d’abord elle pourrait être mutualisée avec d’autres acteurs institutionnels régionaux et donner envie ailleurs… (Des débats existent dans d’autres régions mais pas forcément avec l’étiquette Instance Régionale de Débat Public).
Ici dans le Nord – Pas de Calais nous envisageons de construire un dispositif au long cours et pourquoi ne pas imaginer qu’à terme ce dispositif puisse s’autonomiser ».