Plénière du vendredi 24 juin 2011
Questions au préfet
Question de Sylvain Estager pour le groupe Europe Ecologie Les Verts
Monsieur le Président,
Monsieur le Préfet,
Notre région est marquée, pour ne pas dire stigmatisée, par de nombreux indicateurs
sociaux. Lorsque qu’un nouveau Préfet arrive dans le Nord-Pas-de-Calais, de fait il est
confronté, comme nous tous, à cette réalité.
Dans ce contexte, certaines politiques de l’Etat ont une résonnance particulière.
Surtout quand elles conduisent à aggraver une situation socialement inique et inacceptable.
Nous pourrions ici décliner à l’envie, une dénonciation de la politique générale menée
par le gouvernement. Nous pourrions dénoncer les injustices fiscales qui n’en finissent plus et
leurs corollaires : casse des services publics, de l’Education, de la Santé, des retraites…
Nous préférons illustrer notre propos par quelques exemples, très significatifs, des
effets de ces politiques dans notre Région.
1/ En premier lieu, nous souhaitons aborder la question des fonds sociaux dédiés aux
établissements scolaires de la Région.
Les fonds sociaux, sont attribués par l’Etat aux établissements scolaires pour permettre
aux familles les plus modestes de faire face aux dépenses de vie scolaire et de scolarité.
Après avoir mis à mal, une nouvelle fois cette année, l’Ecole républicaine en supprimant plus
de 16.000 postes, le gouvernement s’attaque aujourd’hui à ces fonds sociaux.
En effet, de nombreux établissements viennent de recevoir les dotations de l’Etat. Ils sont mis
devant le fait accompli d’une diminution drastique de ces fonds sociaux.
Ces fonds, ont vocation à corriger les inégalités sociales au sein de l’Ecole
républicaine. Ainsi, le ministère de l’Education Nationale présente officiellement, le fonds
social cantine comme devant –je cite- : « permettre aux élèves issus de milieux défavorisés,
de fréquenter la cantine de leur établissement ».
La cible de cette politique est donc bien identifiée. Il s’agit des milieux défavorisés.
Concrètement, si ces fonds ne sont pas rétablis, plusieurs milliers de lycéens sur l’ensemble
du territoire régional, ne pourront plus avoir accès au service de restauration.
Prenons l’exemple d’un lycée qui nous a saisis par l’intermédiaire des représentants des
parents et des professeurs élus au conseil d’administration, celui du Lycée Queneau de
Villeneuve d’Ascq.
En 2009, la délégation de fonds sociaux s’élevait à 21.000 euros.
En 2010, elle était de 23.300 euros.
Cette année, elle est annoncée à 6.600 euros, soit une diminution supérieure aux deux tiers.
146 élèves bénéficiant de ces fonds sont déclarés, l’effectif est stable.
En concentrant ces fonds sur la seule restauration, ils permettent donc- plusieurs hypothèses- :
- Soit de couvrir en totalité 21 repas par jour, pour 146 bénéficiaires.
- Soit d’offrir, un repas tous les quinze jours à l’ensemble des bénéficiaires - Soit de permettre une diminution de l’ordre de 15 % du prix du ticket, pour l’ensemble des
bénéficiaires, ce qui, de fait, les exclut presque tous de l’accès à la restauration.
On peut le constater, peu importe la formule retenue, le résultat est désespérant pour ceux qui
doivent mettre en œuvre l’utilisation de ces fonds dédiés.
Ainsi, le gouvernement entend mener ce qu’il appelle une « politique d’optimisation
des moyens ».
En réalité il s’agit ouvertement d’une politique de classe.
D’évidence, il renonce à promouvoir une Ecole qui s’emploie à corriger les inégalités
sociales, dans la limite des moyens qui lui sont attribués,
En conséquence, nous ne pouvons que relayer ici la stupéfaction et colère de
l’ensemble des acteurs de la communauté éducative, face à cette politique.
Nous prenons position, avec la plus grande fermeté, pour condamner ces coupes budgétaires.
2/ Autre exemple, encore plus édifiant, d’une politique que nous ne pouvons que déplorer : la
menace de réforme du régime spécial de sécurité sociale des mineurs.
Un rapport parlementaire, remis par le député Yves Bur, à la fin de l’année 2010
préconise de diluer « au plus tôt » -selon les termes du rapport- le régime minier dans le
régime général.
Ce régime minier, mis en place en 1946, a été instauré pour permettre aux mineurs et à leur
famille de bénéficier de la gratuité effective des soins et pour pallier aux déficiences des
infrastructures dans les territoires miniers, à l’époque.
A l’échelle nationale, du fait de l’héritage de la géographie des mines, les territoires concernés
par ce régime sont en réalité très limités, mais on y trouve au premier rang la région NordPas-de-Calais. En effet, dans la Région, 65 000 personnes sont affiliées au régime minier, ce
qui représente environ un tiers du nombre total des bénéficiaires en France.
Les « œuvres » associées, c'est-à-dire les structures comme les centres de santé, les maisons
de retraites représentent plus de 6.000 emplois.
Alors aujourd’hui, les mines ont fermé, mais les anciens mineurs ou plus généralement,
malheureusement, leur veuves sont toujours là.
Le rapport parlementaire reconnaît d’ailleurs implicitement que ce régime disparaîtra de luimême puisque 6 à 7.000 bénéficiaires disparaissent chaque année.
Toutes les fédérations syndicales minières, relayées par les élus de toute tendance ont
exigé à de nombreuses reprises qu’on ne touche pas à ce régime minier.
A ce jour, l’inquiétude est toujours de mise. Le calendrier gouvernemental prévoit une
dilution de ce régime spécial au 1
er
janvier 2013 et une mobilisation nationale est prévue le 28
juin prochain, à paris,
Il est des sujets qui dépassent le cadre du débat ou de la contradiction politique, pour
rentrer dans celui de la moralité.
Car quand on connaît la réalité du vécu des bénéficiaires,
Car quand on connaît les drames humains qui accompagnent, encore aujourd’hui, l’histoire de
l’exploitation des mines et leurs conséquences sanitaires, on ne peut pas accepter que ces
acquis sociaux soient menacés. Si le Ministre Xavier Bertrand hésite encore à adresser une fin de non-recevoir à ce rapport,
de nombreux élus de cette assemblée et des territoires concernés se tiendront à n’en pas douter
à sa disposition pour l’accompagner dans une visite de terrain qui lui exposera une réalité
singulière des bénéficiaires.
3/ C’est pourquoi, sur les deux questions évoquées.
Nous demandons à l’Etat de rétablir ces fonds sociaux. De ne pas toucher au régime
minier. Mieux, qu’il s’emploie à améliorer ces dispositifs indispensables qui ne génèrent pas
des cohortes d’ « assistés » ou de « privilégiés », mais corrigent a minima des inégalités
sociales telles qu’on n’imagine pas toujours en rencontrer dans un pays riche, en 2011.
Nous vous invitons donc, monsieur le Préfet, à relayer auprès de l’Etat notre détermination.
Nous affichons notre plus grande vigilance face à l’évolution de ces politiques en cours.